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    Le chant des monarques au Mexique

    Roger
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    Le chant des monarques au Mexique Empty Le chant des monarques au Mexique

    Message par Roger Ven 13 Fév - 21:45

    Le chant des monarques au Mexique

    Pierre Gingras
    La Presse


    Le soleil commence à réchauffer lentement la forêt, qui ressemble à plusieurs coins montagneux des Laurentides. Mais nous sommes au centre du Mexique, à 3500 m d'altitude, et les sapins gigantesques, des oyamels comme on les appelle ici, atteignent facilement les 30 m.

    Au loin, quelques cris d'oiseaux viennent troubler le silence. À mesure que le soleil devient plus ardent à travers les branches, un bruit léger, comme un chuchotement, presque irréel, se fait entendre. Autour de nous, des dizaines de milliers de papillons monarques. Ils sont si nombreux qu'on les entend voler... C'est le chant des monarques.



    Un spectacle saisissant qu'une touriste américaine, croisée sur notre chemin, s'est offert comme cadeau d'anniversaire pour ses 60 ans. Visiblement émue, elle tend les bras aux monarques qui viennent s'y poser en guise d'au revoir.
    Le chant des monarques au Mexique Monarq10

    Ces papillons ont souvent parcouru plus de 2000 km pour venir passer l'hiver ici. Et parmi eux, quelques grands voyageurs provenant du Québec et qui ont volé de 3000 à 4000 km pour se joindre à l'assemblée annuelle des hibernants.

    Situé à environ quatre heures et demie de route de Mexico, en pleine montagne comme toutes les aires d'hivernage des monarques au Mexique, le sanctuaire El Rosario fait partie de la Réserve de la biosphère du papillon monarque, qui compte notamment quatre parcs protégés, mais ouverts au public en hiver. C'est l'un des plus importants sites d'hibernation du papillon parmi la dizaine d'endroits fréquentés par l'insecte migrateur, tous concentrés dans les montagnes de l'État du Michoacan et dans certains territoires adjacents de l'État de Mexico.

    Dans la majorité de ces sanctuaires, la partie occupée par les insectes ne dépasse guère une superficie d'un hectare, mais les papillons y sont parfois tellement concentrés qu'ils peuvent se compter par dizaines de millions. À El Rosario, moins de 500 sapins oyamels accueillent les monarques. Et chacun s'installe, année après année, sur le même arbre, guidé, semble-t-il, par l'odeur spécifique de ses aiguilles.

    Le soleil est maintenant au zénith et la chaleur réveille une multitude de papillons qui sortent de leur léthargie. Les insectes s'empressent alors de voler à la recherche d'une parcelle de terrain humide où ils étancheront leur soif, formant de véritables tapis orange. Après avoir bien bu, ils iront rejoindre leurs innombrables congénères restés en hibernation sur les branches des oyamels où ils forment de gros essaims pouvant atteindre 30 à 60 cm de diamètre. Parfois, de grandes parties du tronc sont recouvertes de papillons. De loin, les sapins semblent littéralement enveloppés d'un épais manteau de monarques. De quoi nous faire oublier nos huit heures de route pour se rendre au sanctuaire.

    Une seule génération au Québec

    Si plusieurs comportements des monarques restent encore mystérieux, on sait qu'ils hibernent dans les montagnes du Mexique en raison du microclimat stable engendré par la forêt d'oyamels. Mais il ne faut pas se méprendre. Pendant la nuit, la température descend régulièrement presque au point de congélation. Même si le monarque peut résister durant une brève période à des températures au-dessous de zéro, la neige occasionnelle et la pluie causent de temps à autre de véritables hécatombes dans les sanctuaires.

    Les monarques arrivent au Michoacan à partir d'octobre. La période d'hibernation reste stable de la mi-novembre à la mi-février. Ensuite, parce que la température ambiante en altitude augmente et que le taux d'humidité diminue, les papillons se déplacent vers le bas des montagnes à la recherche de fraîcheur et d'humidité. Fin février-début mars, la danse nuptiale commence. C'est la période de reproduction. Les mâles mourront peu après, alors que les femelles fécondées entreprendront leur voyage migratoire vers le nord. Un périple qui les mènera dans le sud des États-Unis où elles mourront, elles aussi, après avoir pondu leurs oeufs. La poursuite du cycle du monarque sera assurée par les générations suivantes.

    C'est habituellement la deuxième ou la troisième génération qui arrive au Québec en juin, mais parfois la cinquième si les conditions climatiques ont retardé l'avancement des papillons vers le nord. Une seule génération passera entièrement sa vie en terre québécoise. C'est la dernière du cycle - les papillons du mois d'août - qui migrera vers le Mexique, à la mi-septembre.

    De Piedmont à El Rosario

    Les monarques empruntent trois couloirs migratoires.

    Le chant des monarques au Mexique Monarq12
    Les papillons à l'ouest des Rocheuses hibernent en Californie, dans les forêts d'eucalyptus, une espèce pourtant d'origine australienne. Les monarques du centre et de l'est du continent se dirigent vers le Mexique. Fait peu connu, un certain nombre emprunte une autre voie migratoire qui passe par la Floride, puis Cuba (et parfois d'autres îles antillaises), pour ensuite traverser au Yucatan (Mexique) et poursuivre la route jusqu'au sud de l'Amérique centrale. Ces papillons relativement peu nombreux n'hivernent pas, ne semblent pas se reproduire avec les populations locales et meurent au cours de l'hiver, un comportement qui rend les scientifiques perplexes.

    Au Canada, les monarques se dirigent en partie vers le parc de la pointe Pelée, en Ontario, pour traverser le lac Érié (on les retrouve par milliers lors de la migration automnale), tandis que la plupart de ceux qui sont originaires du Québec et des Maritimes optent pour un voyage le long de la côte atlantique. Ce sont d'excellents planeurs qui parcourent en moyenne 75 km par jour, parfois un peu plus si les vents sont favorables.

    Ils migrent de jour et se dirigent grâce à la position du soleil. La nuit, ils se rassemblent dans des aires de repos, les mêmes depuis des décennies, ce qui a souvent amené des mesures de protection spécifiques à ces endroits. Les lépidoptères se nourrissent de nectar de fleurs durant tout leur périple, car non seulement leur faut-il une bonne quantité d'énergie pour voler, mais ils doivent aussi accumuler suffisamment de réserves énergétiques chemin faisant pour hiverner. Les monarques ne mangent pas du tout au cours de leur long séjour au Mexique.

    Des travaux menés par les scientifiques canadiens Len Wassenaar et Keith Hobson, du Service canadien de la faune (Environnement Canada) ont permis de déterminer, grâce à certains isotopes contenus dans leur organisme, d'où provenaient les papillons qui hibernent au Mexique. La grande majorité vient du Midwest américain, des États producteurs de maïs. À peine 5 % sont originaires du Canada. «Il faut se rappeler que le Canada est au nord de l'aire de distribution du papillon. Il y est donc plus rare que dans les États plus au sud, explique M. Hobson. Par ailleurs, le voyage vers le Mexique est beaucoup plus long, ce qui l'expose davantage aux intempéries et à l'épuisement.»

    Si bon nombre de nos monarques meurent au cours de la migration, certains réussissent à se rendre à destination. Un monarque bagué au début de septembre 2002, dans le cadre d'une activité au Centre de la petite enfance De la Vallée, à Piedmont dans les Laurentides, a été trouvé à El Rosario au mois de mars suivant. Le papillon avait parcouru 3811 km! Un autre provenant de l'Insectarium de Montréal, bagué en 2007, a lui aussi été identifié au même endroit. Chaque année, l'insectarium bague autour de 5000 monarques.

    Une longévité exceptionnelle

    Apparu il y a environ deux millions d'années en Amérique tropicale, le monarque est aujourd'hui une espèce répandue un peu partout sur le globe.

    Il réside en permanence en Amérique du Nord, dans certaines îles des Antilles, en Amérique centrale et en Amérique du Sud, à Hawaii, en Australie en Nouvelle-Zélande et dans plusieurs pays d'Asie. Il a déjà été signalé le long des côtes européennes. Seules les populations canadiennes américaines sont migratrices.

    D'un poids autour de 0,5 g et d'une envergure de 9 à 10 cm, (c'est un de plus grands papillons diurnes du Québec), le monarque pond environ 400 oeufs au cours de sa vie. Ceux-ci mettent environ quatre jours à éclore. La chenille grandira durant 9 à 14 jours avant de s'enfermer dans sa chrysalide. Elle aura mué à cinq reprises et son poids atteindra 3000 fois celui de son oeuf. Le papillon adulte émergera 14 jours après le début de la réclusion de la chenille dans sa chrysalide.

    Pas de monarque sans asclépiade


    Si le papillon adulte se nourrit de nectar de fleurs, la chenille, elle se nourrit exclusivement de feuilles d'asclépiades. La relation entre la plante et le papillon est tellement grande que la femelle ne pond ses oeufs que sur quatre espèces d'asclépiades, dont l'asclépiade commune, qu'on retrouve un peu partout au Québec.

    Or, les asclépiades produisent un latex toxique qui est assimilé par la peau de la chenille et qui persiste aussi chez le papillon. Si bien que la grande majorité des oiseaux vont régurgiter l'insecte après l'avoir avalé, une erreur qu'ils ne font habituellement qu'une fois dans leur vie. Par contre, au Mexique, deux espèces d'orioles ont appris à dévorer le papillon en rejetant la peau; un gros-bec s'en délecte goulûment sans problème, comme c'est aussi le cas d'une souris.

    La longévité du monarque est de l'ordre de quatre à cinq semaines. Mais les individus de la dernière génération, ceux qui migreront vers le sud, ont une longévité de sept à huit mois. Ce qui est impressionnant dans l'univers des insectes. Pour fins de comparaison, les humains de la cinquième ou de la sixième génération vivraient autour de... 525 ans.

    Cette longévité s'explique en partie par le fait que les papillons migrateurs ne développent aucun organe reproducteur avant leur périple, ce qui permet des économies d'énergie considérables. Mais quel instinct pousse ce monarque à migrer et surtout à se diriger au Mexique sans que des parents ou des congénères ne lui indiquent le chemin, comme c'est souvent le cas chez les oiseaux? La question demeure toujours sans réponse.

    Une attraction

    Plusieurs centaines de milliers de personnes se déplacent chaque année pour aller à la rencontre des monarques dans les cinq sanctuaires ouverts au public. El Rosario accueille à lui seul de 100 000 à 150 000 visiteurs annuellement. Il y a foule les fins de semaine.

    La grande majorité des visiteurs sont mexicains, car les sites d'hibernation sont très éloignés des centres touristiques, le plus près étant la ville de Mexico.

    La destination soleil la plus rapprochée est la station touristique Ixtapa-Zijuatanejo. Le périple exige cependant au moins deux jours. Il faut environ huit heures de voiture pour se rendre à Ocampo (le village le plus près de El Rosario) via Morelia et le circuit d'autoroutes (prévoir 50 $ pour le péage aller-retour). Du village d'Ocampo (il n'y a qu'un seul hôtel), les 17 kilomètres qui mènent au sanctuaire pourront exiger une autre heure de voiture.

    Les frais d'entrée sont minimes (environ 3 $), mais vous devrez alors marcher une bonne heure en montagne. Le premier kilomètre de sentier est bordé de dizaines de boutiques en bois où souvenirs, artisanat local et nourriture sont offerts. Vous serez obligatoirement accompagnés d'un guide qui veillera à ce que vous restiez dans les sentiers balisés. Ces guides ne parlent habituellement que l'espagnol et, malheureusement, ont peu de connaissances sur leurs protégés.



    Pour en savoir plus

    www.monarchwatch.org Le site par excellence sur le monarque, une initiative de l'Université du Kansas, qui mène de nombreuses recherches sur ce papillon.

    http://www.mexique-fr.com/monarcas.php

    www.learner.org/jnorth/ Pour jeunes et moins jeunes qui veulent suivre notamment la migration des monarques en temps réel.

    http://www2.ville.montreal.qc.ca/insectarium/insect.htm Le site de l'Insectarium de Montréal.

    www.cec.org/monarque Site trilingue. Pour obtenir des détails sur le Plan nord-américain de conservation du monarque.

    Monarque sans frontières: on peut obtenir une trousse d'élevage du monarque dans le cadre du programme Monarque sans frontières de l'Insectarium de Montréal. Les frais sont de 85 $ (incluant asclépiade en pot, cinq à sept chenilles, filet, etc.). Réservations avant la fin d'avril; livraison, début septembre; lâcher, habituellement fin septembre.

    Infos: 514-872-7077.

    Courriel: amisdelinsectarium@ville.montreal.qc.ca

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