Tragédie du Joola : Sept ans après, le même souvenir d’un drame mondial
Dans quelques heures, le Sénégal va célébrer le septième anniversaire de la catastrophe du Joola. Le 26 septembre 2002, le bateau qui transportait près de deux mille passagers sombrait. Sept ans après, le souvenir de ce drame mondial reste vivace.
- Il était une fois Le Joola, ce bateau qui a, pendant dix ans, assuré la liaison maritime entre Dakar et Ziguinchor, avant de sombrer avec près de deux mille personnes à son bord. Tel pourrait être le résumé de l’histoire dramatique de ce navire qui, de la même manière qu’il a marqué l’histoire de la Casamance, a laissé un triste souvenir à tout un peuple qui continue de pleurer les 1 863 victimes officielles. Depuis le 26 septembre 2002, Le Joola a laissé des plaies qui ont du mal à se cicatriser. Car, même après sept ans, beaucoup de Sénégalais gardent encore en mémoire la disparition brutale d’un ou des proches. Comment peut-on oublier un tel événement ? Ce commentaire d’un proche de victime traduit tout le mal que les familles éplorées ont pour chasser les souvenirs atroces d’une catastrophe qui n’a épargné aucune famille à Ziguinchor.
Pourtant, tous les proches de victimes ou presque font quotidiennement des efforts pour ‘réapprendre à vivre’. Mais, la douleur est tellement profonde que les souvenirs agressent quelquefois la mémoire. ‘Depuis deux ans, je parviens à m’affranchir de ces souvenirs de mon fils. Mais, à chaque fois que je vois des enfants jouer, les images de mon garçon surgissent dans ma tête’, commente une dame qui se rappelle de son fils, talentueux footballeur de l’équipe de football Mamadou Marième Diallo. Comme elle, ils sont nombreux les proches de victimes dont les efforts pour oublier, sont souvent anéantis par un événement, une image, un lieu ou tout autre chose qui peut rappeler l’existence d’un être cher, disparu dans la catastrophe du Joola. A quelques heures de la commémoration de ce triste événement, les souvenirs commencent à défiler. ‘Chaque fois que la date de l’anniversaire approche, mes nuits sont perturbées, car je ne cesse de rêver de mon frère qui venait d’avoir le baccalauréat quand il prenait la bateau pour se rendre à Dakar, à l’université’. En tant qu’homme, A. M. pense avoir réussi à vivre avec le souvenir de la tragédie du Joola, mais révèle-t-il, ‘chaque fois que le 26 septembre approche, j’ai l’impression de revivre le même événement et c’est dur à supporter’.
Et pourtant, cette date est là comme pour rappeler qu’il ne faut jamais oublier. Ce samedi encore, les populations reprendront le chemin du port de Ziguinchor, lieu de départ du Joola et le cimetière de Kantène qui accueille, depuis 2002, les corps de plus d’une vingtaine de victimes, pour la plupart anonymes. Ce sera encore un moment de recueillement, de prières, mais aussi de souvenir. Un souvenir qui empoisonne certaines vies. Car, combien sont-ils les proches de victimes qui ont vu leur vie bouleversée dans le mauvais sens après la tragédie du Joola ? Que de vies brisées, d’espoirs anéantis, de carrières interrompues, de familles détruites et disloquées. C’est ça l’autre bilan du Joola. Si bien qu’il est facile de faire semblant d’oublier, mais à beau faire des efforts, la réalité revient toujours à la surface. C’est aussi ça, la vie des proches des victimes du Joola.
‘Nous mourrons avec nos souvenirs’. Il s’agit là du cri de cœur d’un père de famille qui s’adapte difficilement à sa nouvelle situation d’homme qui devrait terminer ses vieux jours sans ses deux enfants, emportés par les vagues de l’océan atlantique. Comme lui, beaucoup de proches de victimes seront ce samedi devant le fleuve Casamance, témoin du voyage sans retour du Joola, pour participer à la commémoration de cette tragédie. Mais, n’allez surtout pas leur demander d’oublier, car la réponse risque d’être invariable : ‘Comment oublier la disparition d’un proche qui n’aura jamais une sépulture digne de ce nom ?’
Article Seneweb